Jean-Gaël Anda : « La Région va-t-elle intégrer l’UVE ? » POLITIQUE

« Monsieur le président, chers collègues, lors de l’Assemblée en date du 29 mars 2019, nous avions adopté la Programmation Pluriannuelle de l’Energie en assemblée plénière en excluant courageusement la solution des unités de valorisation énergétiques (UVE) .Par ailleurs et de manière cohérente je me suis prononcé pour le retrait d’une dotation de fonctionnement de 4 millions en faveur de ILEVA, car la majorité régionale était contre le projet d’UVE de RUNEVA porté par ILEVA ».

« Après 20 ans d’immobilisme, menant à la saturation du site d’enfouissement de Pierrefonds, ce projet est présenté aujourd’hui, comme la seule alternative possible de traitement des déchets !

L’enquête publique est en cours. La Mission Régionale de l’autorité environnementale a fait de nombreuses recommandations sur ce projet et les réponses apportées sont imprécises et inquiétantes.

Les enjeux environnementaux de ce projet sont importants.

A ce jour, les risques sanitaires des fumées toxiques sur la santé ne peuvent être évalués avec certitude. Les habitants du Sud seront en 1ère loge pour être impactés par les nuisances des rejets atmosphériques des fumées et toutes les difficultés liées à l’implantation de cette usine.

  • La qualité de l’air sera mesurée par l’ATMO (Association agréée pour la surveillance de la Qualité de l’air), présidée par une élue qui découvre aujourd’hui que nos déchets sont de l’or. L’indépendance de cet organisme pour nous assurer de son impartialité est sujette à discussion.
    De plus, ces mesures seront diffusées par internet, et avec la fracture numérique de la population réunionnaise, ce mode d’information sera inaccessible pour beaucoup, qui vivront, sans le savoir, dans un air vicié…
  • Ce projet sera implanté dans une zone de production agricole et il est proposé que ces produits devront faire l’objet d’une surveillance environnementale mais RUNeva indique qu’on ne peut pas le faire ni sur les bananes, ni sur ananas, ni sur les fruits cultivés dans le secteur. On pourrait ainsi mettre en vente et consommer, sans contrôle, des produits toxiques.
  • A cela, se rajoutent, les nuisances sonores du bal quotidien des poids lourds venant déverser leurs déchets, du sud, de l’est et de l’ouest ou peut-être encore du nord, ou bien encore de Mayotte, quand je lis dans le journal de Mayotte, les déclarations de certains élus qui indiquent : « Qu’il est intéressant d’avoir une vision et une démarche régionale de la gestion des déchets pour mettre en commun les volumes de gisement pour rentabiliser les équipements de transformation ! » Belle aubaine !

Mes Chers Collègues, allez-vous voter ce jour pour que Saint-Pierre devienne le brûloir à déchets de l’Océan Indien ?

De plus, alors que les problèmes de circulation et d’embouteillages dans la zone sont quotidiens…et que l’arlésienne de la contournante de Saint-Pierre ne facilitera rien, nous aurons chaque jour, le passage de centaines de camions chargés d’ordures. La facture carbone liée à ce flux de camions ; n’a pourtant pas été évaluée…

L’orientation de la Région jusqu’alors, s’inscrivait dans un projet éco citoyen, innovant, en prônant un scénario dit « zéro déchets 2030″, en limitant le recours à la valorisation énergétique des déchets et en privilégiant la pyro-gazéification », dans notre île classée Patrimoine Mondial de l’Unesco dans laquelle l’emploi devient une denrée rare.

Or, le 23 octobre dernier, lors de votre déplacement dans le Sud, sans même que l’Assemblée ne se soit prononcée, la question de l’unité de valorisation énergétique a été abordée et vous avez déclaré, sur ce point . « être prêt à trouver un consensus, dans le cadre de l’assemblée plénière pour que nous arrivions à valider la PPE et franchir ce pas qui est utile pour l’ensemble du territoire, pour inscrire la Réunion dans une autonomie électrique. »

M. le président, J’ai peut être mal compris : Est-ce à dire que la Région accepterait dans ce consensus d’intégrer ce projet d’UVE tant décrié il y a quelques mois ?

Quand vous nous dîtes que nous devons franchir ce pas qui est utile, pensez-vous qu’il ne serait pas plus « utile » de trouver des solutions pour préserver notre environnement, utile de créer des emplois et utile de s’inscrire dans une vision volontariste de réduction des déchets au lieu de nous exposer à des risques ?

Nous avons tous en tête, les nombreuses publicités en 4×3 de fumées toxiques, financées par la Région, sur les effets néfastes des rejets de fumée sur la santé, et des films financés par la Région circulent toujours sur ce sujet pour dénoncer tous les inconvénients liés à ce choix, notamment en termes de santé publique. Est-ce que cette communication payée par les deniers publique aura été utile ?

Si ce nouveau consensus était de valider l’UVE, je suppose que ces déclarations n’ont aucun lien avec les élections départementales et régionales à venir, j’aurai juste du mal à comprendre ce revirement de vos engagements ;

La loi sur la transition écologique pour la croissance verte prévoit une Programmation Pluriannelle de l’énergie (PPE.)

Cette nouvelle PPE intègrera-t-il ce projet sur lequel nous n’étions pas d’accord, il y a encore quelques mois, alors que sur le plan énergétique, cette usine d’un coût d’investissement de près de 300 Millions, ne produira que 3.1 % de l’électricité totale du territoire et proposera peu d’emplois ?

Vous aviez estimé que la solution des unités de valorisation énergétique était inadaptée pour La Réunion et nous défendions un modèle vertueux avec une structure dimensionnée au regard d’un besoin local et de privilégier des solutions ayant le moindre impact sur l’environnement, compte tenu du contexte insulaire s’agissant notamment des déchets dangereux et la région n’avait pas souhaité inscrire dans la PPE révisée la production d’énergie partie des déchets !

Vous savez que l’UVE est contraire au scénario Zéro déchets, car il va nous inciter à produire toujours plus de déchets pour nourrir la bête, et va libérer des nanoparticules toxiques. Les REFIOM risquent de polluer les sols et nos nappes phréatiques, puisque ILEVA ne présente aucune proposition concrète de leur prétendu transport vers la métropole.

Il ne restera donc qu’à les enfouir, et après avoir pollué l’air on continuera à polluer les sols.

Mes chers Collègues ; les enjeux de l’environnement sont essentiels, et la transition économique et écologique doit nous inciter à dire non à l’enfouissement, non à l’incinération mais oui à la réduction des déchets vers laquelle nous devons nous diriger pour diminuer nos poubelles à la source et en privilégiant le recyclage des déchets, par la mise en place de nouvelles filières créatrices d’emplois.

Il existe des solutions immédiates à mettre en œuvre, avec une volonté politique forte et un courage qui nous distinguerait.

Je reste quant à moi fidèle à mes engagements, je voterai contre les orientations budgétaires car les sudistes ne comprendront pas dans quelques années de fonctionnement de cet UVE, que nous avons pris cette lourde responsabilité de les exposer aux risques pour leur santé.

Il nous appartient de protéger nos populations et les générations futures et de nous engager en ce sens. Nos décisions d’aujourd’hui vont impacter les générations futures et nous avons des responsabilités à leur égard.

Contrairement à ceux qui défendent l’urgence pour la mise en place de ce projet moi je prône l’urgence de préserver notre qualité de vie, notre santé, de créer des emplois !

A défaut, les délits d’écocide prévoyant de sanctionner les pollueurs de l’environnement ont de beaux jours devant eux.

Je vous remercie de votre attention Monsieur le président et chers collègues ».

Jean Gaël Anda